« Un psychanalyste, ça ne parle pas. »

Le psychanalyste n’est certes pas « bavard ». Cependant, il a à répondre des paroles qui lui sont adressées. Il doit prendre acte de ce qui lui est dit. Il interroge et cherche à saisir une logique, avec l’analysant.e. Il interprète et propose des formulations alternatives. Il n’est donc pas silencieux, ni dans une position de pur témoin ou d’enregistreur passif. Il intervient et oriente les échanges avec l’analysant.e.

« La psychanalyse, c’est cher. »

Les séances de psychanalyse ne sont pas remboursées par la sécurité sociale. Les honoraires sont néanmoins fixés avec la personne accueillie, en fonction de ses moyens financiers et de son désir de s’impliquer dans le travail psychique. Ils dépendent aussi du nombre de séances dans la semaine ou dans le mois. Et le praticien peut prendre en compte les cas particuliers. D’autre part, chacun mesurera le coût aux effets induits par le travail effectué. On peut gagner du temps et de l’énergie, à rencontrer rapidement la bonne personne, associée à la bonne formation.

« La psychanalyse, ça dure longtemps. »

La durée d’accueil est variable. Tout dépend non seulement des raisons pour lesquelles on s’adresse à un analyste, mais aussi des efforts que l’on consent à faire, des résistances auxquelles on est confronté, et aussi des aléas de la vie (rencontres, changements professionnels, venue d’un enfant, etc.). Quelques mois sont nécessaires pour asseoir une évolution. Par exemple, les accompagnements proposés au CPCT de Lyon sont de 4 mois environ, soit 16 séances à raison d’une fois par semaine. C’est une temporalité liée à la gratuité du suivi et aux situations d’urgence sociale et psychique. On peut donc compter de 3 à 6 mois pour une première phase de travail en cabinet libéral. Ensuite, chacun opte pour une fin des rencontres au moment opportun.

« La psychanalyse, c’est pour les intellos. »

La psychanalyse se met à l’écoute de chacun, exactement selon ses manières de s’exprimer et de s’insérer dans le langage. Lors d’une séance d’analyse, chacun vient tel qu’il est et parle comme il l’entend, c’est la meilleure manière de s’écouter et d’être entendu. L’outil essentiel de la psychanalyse étant la parole, chacun en est pourvu et cherche, avec ses mots, à dire au plus près ce qui lui arrive et ce qui lui pose problème.

« La psychanalyse, c’est plus d’actualité. »

La psychanalyse n’est plus « à la mode », comme elle a pu l’être dans les années 1960-80. Pour ma part, je considère pourtant que la psychanalyse n’a jamais été aussi actuelle qu’à notre époque.

Faire émerger ce que je désire véritablement et pourquoi j’ai rencontré certaines questions ou certaines impasses, cela demande du temps : du temps que l’on s’accorde pour s’écouter et prendre enfin ses propres décisions. Or ce temps est souvent comprimé par les obligations familiales et professionnelles, par le rythme de nos vies et la pression des outils numériques. Opérer un retour sur soi appelle une parenthèse dans la précipitation de notre époque. Cette parenthèse, c’est la séance d’analyse.

Quant aux réseaux sociaux et à l’ensemble des échanges virtuels, ils compliquent notre relation à l’autre. La présence d’autrui-même devient parfois un problème. D’où l’importance de rencontrer quelqu’un, ici et maintenant, dans le moment de la séance et « en présence ».

Enfin, les produits de consommation et la marchandisation des vivants brouillent les repères entre consommation et relation, besoin et désir. Examiner notre rapport au manque et à nos désirs sous-jacents s’avère d’autant plus nécessaire.

« La psychanalyse est sexiste (ou machiste) »

Selon certains ou certaines, la psychanalyse véhiculerait des préjugés défavorables aux femmes. Elle reconduirait les inégalités hommes/femmes héritées de la tradition. C’est d’abord oublier que Freud a été conduit à la découverte de l’inconscient suite à la rencontre déterminante avec des femmes. Ces femmes, il a su les écouter et entendre avec acuité leurs troubles et leurs maux. De surcroît, il a mis au jour le fait qu’une partie de leurs désirs était « refoulée ». Et ceci non sans lien avec les discriminations de genre.

La cure psychanalytique pouvait ainsi les accompagner vers une dynamique d’émancipation. D’autre part, Freud a contribué à dissocier le genre et le sexe biologique. Il a montré que la genèse psychique de la sexualité l’emportait sur la conformation physiologique des individus.

A cela s’ajoute la thèse selon laquelle chacun d’entre-nous est traversé par des dynamiques désirantes tout autant « féminines » que « masculines ». Il y a donc bien – pour Freud mais aussi pour Lacan – deux manières de désirer : sur un mode « féminin » et sur un mode « masculin ». Mais celles-ci s’entremêlent à des degrés divers en chacun, sans que par ailleurs ces modalités puissent être hiérarchisées dans leur valeur ou leur légitimité.

« La psychanalyse est homophobe/transphobe/etc. »

C’est un reproche formulé notamment par certains auteurs ou militants. Il y a là un profond malentendu, peut-être doublé pour certains par de mauvaises rencontres. Freud lui-même s’est opposé à la pénalisation de l’homosexualité, encore largement répandue à son époque, ainsi qu’aux thèses faisant de celle-ci une dégénérescence et donc une maladie (thèse encore véhiculée par l’OMS jusque dans les années 1980).

La théorie freudienne fait de l’homosexualité un choix personnel, un « choix d’objet » indépendant des éventuelles difficultés psychiques rencontrées par l’individu. Consulter un psychanalyste amène avant tout à interroger ses impasses ou ses énigmes personnelles, quelles que soient ses préférences en termes de sexualité, de genre, de choix d’un.e partenaire.

Il en va de même du côté de la recherche d’une identité sexuelle, selon les différentes démarches contemporaines désignées par l’acronyme LGBTQI+. Ce qui importe dans une démarche psychanalytique, c’est de suivre son propre questionnement, de frayer la voie de son désir singulier, au-delà de toute étiquette ou assignation sociale.

« La psychanalyse, c’est pas scientifique. »

Dans son statut « épistémologique », la psychanalyse n’est pas une science, du moins au sens des sciences expérimentales. Cependant, le reproche qui lui est adressé, lorsqu’on entend qu’elle ne serait pas « scientifique », équivaut généralement à une condamnation : elle ne serait pas rigoureuse voire irrationnelle. C’est une critique scientiste, consistant à confondre la rationalité avec la seule démarche expérimentale, et la recherche de la vérité avec la seule démarche hypothético-déductive.

Ceux qui formulent ce reproche envers la psychanalyse sont doublement aveugles :

1/ quant aux conditions mêmes de production de la connaissance expérimentale

2/ quant à l’élaboration complexe et rigoureuse de la théorie psychanalytique, en particulier chez Freud et Lacan.

Sur le premier point, qui mériterait de plus amples développements. Les sciences modernes se sont constituées aux XVIème et XVIIème siècles, lors de la « révolution galiléo-copernicienne ». En se limitant à la vérification des faits observables, elles ont permis de remarquables avancées, associées à une spécialisation croissante. Mais ceci n’est pas sans contrepartie ! D’une part, leur approche du réel s’est trouvée limitée à ce qui pouvait être mesurable et quantifiable.

D’autre part, chaque science s’est de plus en plus restreinte à une facette du réel, à une petite partie de la réalité. Il en est résulté une perte de vision du « tout » ainsi qu’un oubli central : la réalité n’est pas uniquement faite de données observables et quantifiables.

Et c’est particulièrement le cas pour l’être humain ! Ses sentiments, ses contradictions, ses souffrances, sa subjectivité ne sont pas réductibles à des algorithmes ni à des protocoles expérimentaux ; ni sa pensée à des circulations neuronales. L’être humain n’est pas réductible à un rat de laboratoire. Une conception trop étroite de la science conduit à l’occulter et à perdre de vue ce que la philosophe Hannah Arendt appelle la dimension de l’homme, c’est-à-dire son humanité et sa subjectivité propres.

Sur le second point, la psychanalyse résulte d’une démarche théorique rigoureuse, capable de se mettre à l’épreuve de la clinique (la rencontre avec des patient.e.s, au cas par cas). Elle consiste en une réélaboration continue de ses modèles théoriques, dans la confrontation avec l’expérience, entendue non pas au sens de l’expérimentation mais de la prise en compte concrète et précise des cas individuels de chaque patient.e ou analysant.e .

Qu’il s’agisse de Freud ou de Lacan, ils ont su tirer partie des connaissances scientifiques de leur époque, mais aussi de la philosophie et de la littérature. Ils ont construit à partir d’elles des raisonnements et des argumentations que chacun peut lire et comprendre, à la mesure des efforts nécessaires, comme pour toute réflexion théorique.

La psychanalyse n’est donc pas anti-scientifique, ni encore moins irrationnelle. Elle se loge plutôt au revers des sciences. Là où leur développement produit des zones d’ombre ou des oublis, la psychanalyse s’efforce de les prendre en considération. Elle ne prétend pas détenir la vérité ni encore moins occuper une position de surplomb.

Elle se propose plutôt d’explorer ces points d’obscurité, avec l’analysant.e et avec l’ambition que des clarifications s’opèrent – et qu’il en résulte des effets thérapeutiques ou des déplacements subjectifs conformes au désir de chacun. La psychanalyse partage avec Socrate sa lucidité sur le non-savoir au cœur même du savoir. Corrélativement, elle agace ceux qui prétendent tout savoir – et qui détiennent le pouvoir.

La science proprement dite propose des « solutions », des réponses générales et des protocoles de traitement uniformisés. Cela présente une certaine pertinence et permet de traiter un certain nombre de problèmes. C’est un point d’appui important et incontestable, avec des avancées régulières mais aussi des points de débat entre les chercheurs. La psychanalyse propose autre chose : un accueil de la parole qui n’est justement pas prise en charge par des traitements ou des protocoles, soit l’intime subjectivité de chacun et une façon de l’exprimer qui lui est propre.

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